Dorra Mahjoubi

nous présente les fruits de son confinement …

Une bouchée d’ART

… totalement comestible, bio et sans colorants chimiques

« La quête de sens,
Est-ce elle qui oriente notre capacité à tolérer la face sombre de la vie ?

C’est elle, non ?!
C’est elle qui nous tend la main en plein naufrage ?
Est-ce elle, qui sent ce si doux parfum de madeleine dans la cuisine de ma mère, un certain après-midi de mes cinq ans ?

Nous sommes le 05 mai 2020, c’est une journée de confinement comme les autres. Je ne sais pas si elle ressemble plus, à celle qui l’a précédée ou à celle qui la suivra. Figée, je distingue à peine, la silhouette de mes tulipes, à travers la vitre ornée d’un léger voile en dentelle blanche fleurie.
Ce sont les derniers rayons de soleil ! Une journée passée comme un éclair, est-ce rien d’extraordinaire ? L’heure semble figée, et moi j’essaie de la suivre dans ses périples et micro-secousses. Je suis probablement aussi figée et aussi étendue sur la surface de l’existence. Pourtant je n’ai jamais vu ma vie passer aussi vite qu’en temps de confinement. J’ai l’impression que le temps nous échappe pour la première fois. Loin de moi l’idée de le maîtriser, car ce serait prétendre à une vaine exactitude. Mais j’ai le sentiment que ce dernier coule comme une eau entre les doigts d’une main aujourd’hui bleue, étendue par terre, morte. Cette eau ne sert plus à arroser ce que cette main a semé. Elle coule vers d’autres contrées.

Que l’on me pose la question mille fois… je répondrai toujours au temps qui passe.
Ah c’est vrai, je le vois couler entre mes doigts mais je ne le sens plus…
Je lève alors mon verre à ce temps qui dance au rythme de son nouveau souffle.
Ah non je ne peux pas ! J’ai perdu ma main !
Oh temps !
Comment avons-nous fait pour te consommer ? Tu nous consumes ? Dis !?
Comment peut-on survivre aux intempéries, si l’on n’a pas de sens à son existence ?
Réponds-moi !
C’est bien toi qui donne la vie et la mort au silence, NON ? alors PARLE !
Apprends-moi à chanter la berceuse chaque soir à mes jeunes jours qui passent !
Oh temps !
Tu te dilates dans mon cœur, donnant à la nostalgie de différentes dimensions et l’hiver s’achève en dévorant affreusement ses derniers crépuscules.

La porte du faire se ferme. C’est la plus grande porte d’accès du royaume de l’être. Paniqués, les habitants se bousculent dans un vacarme assourdissant. Il paraît qu’il y a eu même des morts à cause des agitations au sein de la citadelle emmurée. Seul le roi, connaît toutes les portes, y compris celles de la lumière infinie.

La lumière jaillit et réchauffe ma main et le ruisseau coule toujours… Entre mes doigts.
Je lève mes yeux pour contempler le ciel qui vire du gris au bleu.
»

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