Asma Ghiloufi

nous présente les fruits de son confinement …

Confinement

Le mal de l’autre résonne aussi fort que ne retente une solitude mûrie dans la foule ; le réveil y met de l’aigreur autant que le sommeil ne fabrique des oublis.

Le temps que nous coulons, qui nous coule, ce même temps que nous invitons à chaque passé resurgit, dans ce qui se dira et les rires orphelins, ce temps que nous habillons de vestiges inventés, que nous glaçons sous des serments et que nous accrochons, fiers, aux feints passants, à des passages différés, à des haltes et des retours improvisés, ce temps que nous ingurgitons presque de gré, presque de force, ne connaît pas de mesure.
Le mal de l’autre résonne aussi fort que ne retente une solitude mûrie dans la foule ; le réveil y met de l’aigreur autant que le sommeil ne fabrique des oublis.

Le temps qui n’arrête de partir, qui de chaque souffle restitué à l’air qui nous entoure, se fait ombre et prend allure, ce temps qui n’a de traces mais qui accuse le poids de nos rebours, qui nous déjoue la lumière à la moindre vie, qui nous fait pousser les remords à coups de mémoires et la foi à raison d’abandons, ce temps à la mine apathique, à la marche amnésique, au teint froidi et aux troubles contours, ce temps-là ne connaît pas de mesure.

Le mal de l’autre résonne aussi fort que ne retente une solitude mûrie dans la foule ; le réveil y met de l’aigreur autant que le sommeil ne fabrique des oublis. Le temps qui nous écourte la parole, nous roule les promesses et s’offre en résidu, ce temps qui nous sème dans les maigres présences, et les discours à mensonges et les rêves aplatis, ce temps nous offre de quoi nous pâlir, de quoi nous polir pour glisser facilement, pour passer gentiment et ne retenir de nous-mêmes le soupçon d’une constance,  ce temps qui nous rétracte dans l’autre, dans son mal, dans sa bêtise, nous prenant en otage, il ne nous appartient pas, ce temps-là, jamais, ne connaît la mesure.  

Retour aux Fruits Confinés